mercredi 30 novembre 2011

La scolarisation des enfants est un acte révolutionnaire et bon marché

C'est bien ce que pense John Wood, un immense philanthrope inconnu du grand public : comme Andrew Carnegie - une légende de la philanthropie - il construit des bibliothèques dans les endroits les plus reculés (il en est à 12000 !) ainsi que des écoles (1500 !). Autre temps, autre style : les édifices de Carnegie étaient majestueux ; ceux de Wood sont rustiques ... mais il en inaugure six par jour. Son organisation ne recule pas devant les défis : "comme il n'existait pas de littérature enfantine dans certaines langues, nous avons dû en éditer nous-mêmes". Près de 600 volumes l'ont ainsi été en kmer, népalais, zulu, lao, xhosa, etc.
Ancien directeur marketing chez Microsoft, il s'attaque à l'illettrisme comme à un nouveau marché et a organisé des antennes de collecte de fonds dans 53 villes du monde : "je ne supporte pas le fait qu'il y ait 793 millions d'illettrés alors que la solution est si bon marché".
Oui, la scolarisation des enfants est un acte révolutionnaire : c'est aussi le meilleur investissement que nous puissions faire. Il est vraiment à la portée de chacun, pourquoi donc s'en priver ?

lundi 31 octobre 2011

Où sont les femmes ?


Elles manquent à l'appel dans les contrées où la naissance d'une fille n'est vraiment pas une bonne nouvelle : il lui faudra une dot, et elle servira à labourer le champ du voisin ! C'est ainsi que naissent en Inde, actuellement, 112 garçons pour 100 filles, au rebours de la proportion générale (un peu plus de filles que de garçons). Celles qui manquent ont fait l'objet d'avortements sélectifs, interdits par la loi mais souvent pratiqués après l'échographie, ou pire encore.
L'Etat du Maharashtra, qui détient le triste record du déséquilibre des naissances, a pris le 22 octobre une décision symbolique : rebaptiser plus de 200 filles en les dotant d'un nouveau prénom sympathique ! Elles s'appelaient en effet Nakushi, ce qui signifie "non désirée" dans la langue locale ... Les Nakushi naissent dans des familles qui n'ont pas les moyens de connaître le sexe de l'enfant à venir ... les nommer ainsi fait espérer la naissance ultérieure d'un garçon.

Les filleules du Trèfle Bleu sont protégées par leur parrainage : venez en parler avec les cinq parrains-voyageurs qui ont été à leur rencontre cet été. Ce sera le 27 novembre, et toutes les infos sont sur http://automneindien.blogspot.com/.

lundi 10 octobre 2011

Un peu de maturité dans le discours humanitaire

Comme tout le monde, je reçois d'innombrables appels au don : une évolution se dessine, heureusement, vers une communication plus informative et même (parfois) plus réaliste.
Mais on voit encore de drôles de choses : quelle ne fut pas ma surprise de recevoir un pli de l'Association pour la Recherche sur le Cancer, accompagné d'une sorte de pilulier transparent censé abriter le "gêne de la générosité" (à coller sur le bon de soutien !!!). Ce type de discours me parait non seulement ridicule, mais contre-productif, à la fois pour cette association et pour les autres.
La rude concurrence entre associations humanitaires lasse le public, mais au surplus le fait douter. Certes, il est difficile d'attirer l'attention sur une cause : mais ce n'est pas en utilisant des approches marketing fondées sur l'impulsion qu'on facilitera l'émergence d'un vrai comportement philanthropique.
Nombreux sont ceux qui donnent de petites sommes au gré des demandes (ou des sollicitations dans la rue ... exaspérantes à la longue pour ceux qui vivent comme moi dans des quartiers fréquentés) mais qui finalement ne savent plus pour qui ni pour quoi.
Alors bravo aux associations qui osent tenir un langage plus réaliste, plus nuancé, plus rude parfois (je pense à MSF) : ils participent à construire un discours humanitaire plus mature, plus respectueux, et au total, je l'espère, plus efficace.

jeudi 8 septembre 2011

Drame somalien : les paradoxes du discours humanitaire

Devant l'épouvantable situation de famine dont souffrent des millions d'êtres humains dans la Corne de l'Afrique, trois types de messages contradictoires parcourent nos médias :
1/ Il faut acheminer des vivres ;
2/ Il faut donner aux associations qui sont sur place ;
3/ Il faut faire confiance aux ONG expérimentées, et accepter l'idée qu'elles font du mieux qu'elles peuvent, sachant que les solutions sont imparfaites et compliquées à mettre en oeuvre. Bref, donner beaucoup pour que parvienne peu.
Le 1er septembre dernier, le roulier Eider appareillait à Toulon à destination de Djibouti, emportant 267 tonnes de riz, 40 de farine, 48 de sucre et 26 d'huile. Le tout avait été réuni par l'association "France Afrik Terre 2 Kultur" de Villiers sur Marne, la région PACA, des filières agro-alimentaires, sous la houlette du Ministère des Affaires Etrangères. Articles dans la presse, mobilisation associative, félicitations et discours chaleureux des politiques : tout ce qui fait plaisir.
C'est oublier un peu vite la réalité : acheminer des denrées est d'un coût exorbitant pour un résultat faible, tant la probabilité de parvenir aux populations concernées est limité.
Les rares ONG présentes en Somalie préfèrent, bien sûr, des dons qui leur permettent d'acheter sur place : "Nous préférons nous appuyer sur des commerçants locaux pour faire vivre une économie et pour assurer la sécurité de nos équipes qui ne sont pas accusées de faire venir des aliments de l'extérieur", explique la responsable Afrique de l'est à Solidarités International. Le porte-parole de MSF est plus direct encore : "En Somalie, le contrôle de l'aide est un motif de combat entre les factions (...) On ne peut donc pas garantir qu'il n'y a pas de détournement. Sur place, les équipes ne peuvent pas se déployer comme elles l'entendent, n'ont pas toujours accès aux victimes. Je dirais même que le détournement est garanti, car ne pas l'accepter ce serait renoncer" (lu dans Var-Matin le 1er septembre).
Il ne faut donc pas s'étonner que les donateurs soient perplexes ! Faut-il pour autant leur raconter de belles histoires et leur donner à penser que l'humanitaire, c'est simple ? Il serait temps à mon sens (et certains commencent à le faire) d'élaborer un mode de communication plus réaliste, plus nuancé, qui contribue à une pédagogie du don, et à une meilleure connaissance des réalités de notre monde.

mardi 9 août 2011

Un océan de filles !


Voici la première photo reçue de Hiam et Emmanuel qui ont été à la rencontre des filleules du Trèfle bleu. Elle est sans doute prise à Tranquebar, dans le Tamil Nadu au sud d'est du continent indien. Cela se passe, je crois, de commentaire ...

lundi 4 juillet 2011

Vient de paraître dans l'Archicube ...

... un article que j'ai écrit sur "Les nouveaux philanthropes", puisque ce numéro est centré sur le mécénat et la philanthropie. J'y propose une synthèse à ma sauce des facteurs d'évolution du secteur, que je trouve très importants, parce qu'ils sont en passe d'en faire - aussi - un véritable secteur économique et professionnel.
En voici l'introduction :
"En ce début de siècle, la philanthropie a changé de visage, et son mode de pensée s’en trouve transformé : il est devenu créatif.

Trois facteurs essentiels ont déclenché cette mue : l’engagement des très grandes fortunes (essentiellement américaines) qui abordent ce domaine avec un esprit d’entreprise et d’efficacité qui le renouvelle complètement ; l’intérêt récemment porté par la recherche universitaire au domaine de la lutte contre la pauvreté, relayée par une vulgarisation de qualité : l’éclosion de petites entités oeuvrant pour une action ciblée, favorisée, en France, par la nouvelle forme juridique des fonds de dotation, qui a modifié de façon inattendue et assez radicale le paysage classique des organisations à but non lucratif."

N'hésitez pas à me demander la suite !

mercredi 25 mai 2011

Un dernier effort pour éradiquer la polio en Inde | Fondation Bill & Mel...

Le dernier mètre ...

... c'est le plus dur à parcourir ! Et un défi propre à la philanthropie privée. L'éradication de la poliomyélite est un bon exemple : Bill Gates semble en faire une affaire personnelle, et sa Fondation investit de manière massive en Inde, mais aussi au Congo et en Angola, pour élargir la couverture vaccinale au plus près de l'ensemble de la population. C'est un effort considérable, car il faut aller vacciner partout, plusieurs fois, trouver des gens pour le faire, etc. Aucune politique publique ne peut dépenser autant pour un impact aussi minoritaire à court terme.
De même la Fondation est devenue le plus gros contributeur mondial à la recherche d'un vaccin contre le paludisme (rappelons que près d'un million de personnes en meurent chaque année ...)
Le paludisme est typiquement une maladie de pauvres, et n'ouvre donc pas de marché. Il est donc essentiel que la philanthropie privée monte en puissance à côté des politiques publiques, parce qu'elle peut oser "le dernier mètre".

samedi 23 avril 2011

Des pommes, des sardines et des macarons

C'est le repas dont rêve une togolaise qui vient d'hériter de son frère (vu dans une émission d'M6 sur l'héritage) ! Il est vrai qu'elle confectionne chaque jour, pour se nourrir ainsi que ses proches, des beignets de rat ...
Ceci pour nous rappeler simplement aux réalités : le budget alimentaire représente en Europe 14% du budget des ménages, contre plus de 60% en Inde, par exemple.
La priorité des priorités, c'est de nourrir la planète. Et puis aussi de la soigner et de l'éduquer.
Parrainons, parrainons encore, car c'est la manière la plus concrète de soutenir ceux qui sont efficaces sur le terrain !

vendredi 18 mars 2011

Japon : vers une pédagogie du don ?

Saluons le discours de France Générosités à l'occasion de la triple catastrophe qui a frappé le Japon : son président a expliqué qu'il était prématuré de faire appel aux dons. La stupeur et l'émotion étaient pourtant à leur comble, et nombre d'entre nous prêts à manifester leur solidarité. Reste qu'il faut d'abord, surtout dans un pays aussi organisé, savoir comment, où, avec qui se rendre utile ! On se souvient des fonds considérables collectés lors du tsunami de 2004 ... que l'on ne parvenait pas à affecter. Et des résultats mitigés de l'immense élan en faveur d'Haïti.
Il faut bien se rendre compte que l'argent ne fait pas tout : ce n'est d'ailleurs pas toujours lui qui manque le plus dans les pays dont la situation est la plus critique. Ce qui est compliqué, c'est d'acheminer les fonds et de les rendre opérationnels au bon endroit, et surtout, entre les bonnes mains. Ce qui manquera bientôt le plus dans l'action philanthropique, ce sont les bras : les acteurs de terrain, qui connaissent leur sujet, et le traitent au plus près des besoins. C'est pourquoi je me suis engagée en faveur du parrainage d'enfants : ce n'est pas grandiose, mais c'est concret, et nous savons qui l'organise pour que ça marche !

samedi 26 février 2011

Gouvernance et transparence deviennent les deux mamelles de la philanthropie

Selon le journal "Branchez-vous Matin" plus des trois quarts (77 %) des Québécois craignent d'être victimes d'arnaques, selon un sondage récent de la firme Angus Reid. L'augmentation des fraudes entrainerait une diminution du nombre de dons dans la province. Cette information est reprise par "Philanthropie Québec" qui insiste sur l'importance d'une bonne gouvernance pour les institutions philanthropiques : "pas de règles d'observance fiscales, pas de confiance du public donateur, pas de dons, pas d'activités et donc pas de pérennité de l'organisme de bienfaisance".

C'est probablement vrai aussi en France, et cela doit nous pousser à l'innovation dans le domaine philanthropique ! Il ne s'agit plus de raconter des belles histoires : il faut leur donner un contenu. Les donateurs ne fonctionnent plus seulement à l'émotion : ils souhaitent des informations, une transparence ... et sans doute, demain, des évaluations. C'est d'ailleurs passionnant, mais il faut s'y mettre ...

mercredi 9 février 2011

Un nouveau logo pour le trèfle bleu


Il faut préparer le printemps ! Cela veut dire un nouveau logo pour le trèfle bleu (et même deux ! selon que le trèfle est bleu sur fond blanc ou vert sur fond bleu ...).
Au fait, lequel préférez-vous ?
Et une nouvelle page sur Facebook. A bientôt

dimanche 30 janvier 2011

Les jeunes indiens sont les plus optimistes du monde

C'est l'une des conclusions de la passionnante enquête menée par la Fondation pour l'innovation politique sous la direction de Dominique Reynié, et intitulée "2011, la jeunesse du monde". L'enquête a été menée en juin-juillet 2010 dans 25 pays sur la base d'échantillons de 1000 individus âgés de 16 à 29 ans.
J'ai regardé tout particulièrement les résultats relatifs aux jeunesses de trois pays, dans lesquels le CFPE conduit des programmes de parrainage : l'Inde, le Maroc et la Roumanie. Ce qui frappe d'abord, c'est la disparité de leur perception de la mondialisation : celle-ci est considérée comme une opportunité par 87% des jeunes indiens (presque ex-aequo avec les jeunes chinois - 91% -), par 67% des jeunes roumains, et en bas de classement, par 49% des jeunes marocains. Il n'y a sans doute rien de très étonnant là-dedans, comme semblent l'indiquer en particulier les événements en cours au Maghreb.
En revanche, l'optimisme des jeunes indiens est stupéfiant ! Ils sont de loin les plus à l'aise dans leur époque (84% disent être satisfaits de l'époque dans laquelle ils vivent, devançant les jeunes chinois - 64%) ; ils sont aussi ceux qui pensent le plus que l'avenir de leur pays est prometteur (83%), et que leur avenir personnel l'est aussi (90%). Impressionnant !


dimanche 23 janvier 2011

Microcrédit et réduction de la pauvreté : ça chauffe !

La polémique née ces derniers temps sur les vertus ou les dangers du microcrédit prend de l'ampleur. Le débat, naguère confiné chez les spécialistes, est venu sur les devants de la scène avec un reportage d'Envoyé spécial sur France 2, et une tribune d'Esther Duflo dans le Monde en janvier 2010 (http://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/11/microcredit-miracle-ou-desastre-par-esther-duflo_1290110_3232.html). Surtout, les Etats concernés au premier chef - le Bangladesh (où la Grameen Bank est née), l'Inde et le Nicaragua - manifestent aujourd'hui une franche hostilité ! Le premier ministre du Bangladesh a même déclaré que les prêteurs "sucent le sang des pauvres au nom de la lutte contre la pauvreté" ... Le succès du microcrédit est en train de se retourner contre lui : trop de prêts, trop de prêteurs, trop d'emprunteurs dont une partie reste prisonnière d'une spirale infernale de surendettement. Le microcrédit concernait en 2009 plus de 80 millions de clients, pour un total de plus de 70 milliards de dollars. Le nombre d'organismes de microcrédit a cru de manière saisissante (certains affichent une croissance de plus de 60%/an), générant d'énormes profits. Il est devenu clair que le secteur doit se réformer, et surtout que la recherche sur les effets du microcrédit et sur les bonnes pratiques est indispensable.
On lira avec profit sur ce sujet l'ouvrage d'Esther Duflo La politique de l'autonomie (Le Seuil, janvier 2010), ainsi que le dossier de l'Institut français de Pondichéry (
http://www.ifpindia.org/+Debat-contradictoire-sur-les-vertus-du-microcredit+.html)

Il est également intéressant d'aller visiter le site d'un fonds de micro-développement créé par l'un de mes amis (http://www.credit-at-people.org/) : dans l'onglet "fonctionnement", on pourra télécharger un tableau récapitulatif de l'organisation du microcrédit en Inde.
Ce serait dommage qu'une belle idée soit proscrite à cause de ses abus !