jeudi 8 septembre 2011

Drame somalien : les paradoxes du discours humanitaire

Devant l'épouvantable situation de famine dont souffrent des millions d'êtres humains dans la Corne de l'Afrique, trois types de messages contradictoires parcourent nos médias :
1/ Il faut acheminer des vivres ;
2/ Il faut donner aux associations qui sont sur place ;
3/ Il faut faire confiance aux ONG expérimentées, et accepter l'idée qu'elles font du mieux qu'elles peuvent, sachant que les solutions sont imparfaites et compliquées à mettre en oeuvre. Bref, donner beaucoup pour que parvienne peu.
Le 1er septembre dernier, le roulier Eider appareillait à Toulon à destination de Djibouti, emportant 267 tonnes de riz, 40 de farine, 48 de sucre et 26 d'huile. Le tout avait été réuni par l'association "France Afrik Terre 2 Kultur" de Villiers sur Marne, la région PACA, des filières agro-alimentaires, sous la houlette du Ministère des Affaires Etrangères. Articles dans la presse, mobilisation associative, félicitations et discours chaleureux des politiques : tout ce qui fait plaisir.
C'est oublier un peu vite la réalité : acheminer des denrées est d'un coût exorbitant pour un résultat faible, tant la probabilité de parvenir aux populations concernées est limité.
Les rares ONG présentes en Somalie préfèrent, bien sûr, des dons qui leur permettent d'acheter sur place : "Nous préférons nous appuyer sur des commerçants locaux pour faire vivre une économie et pour assurer la sécurité de nos équipes qui ne sont pas accusées de faire venir des aliments de l'extérieur", explique la responsable Afrique de l'est à Solidarités International. Le porte-parole de MSF est plus direct encore : "En Somalie, le contrôle de l'aide est un motif de combat entre les factions (...) On ne peut donc pas garantir qu'il n'y a pas de détournement. Sur place, les équipes ne peuvent pas se déployer comme elles l'entendent, n'ont pas toujours accès aux victimes. Je dirais même que le détournement est garanti, car ne pas l'accepter ce serait renoncer" (lu dans Var-Matin le 1er septembre).
Il ne faut donc pas s'étonner que les donateurs soient perplexes ! Faut-il pour autant leur raconter de belles histoires et leur donner à penser que l'humanitaire, c'est simple ? Il serait temps à mon sens (et certains commencent à le faire) d'élaborer un mode de communication plus réaliste, plus nuancé, qui contribue à une pédagogie du don, et à une meilleure connaissance des réalités de notre monde.